avec sa jaquette papier jauni L'année commença par un déjeuner. A midi et demi le petit restaurant était complet. On pouvait admirer là quelques sérieux convives : des familles entières avec cet embonpoint qu'on acquiert à passer tous les jours deux ou trois heures à table les yeux sur l'assiette et les conversations remises à plus tard. Le patron du restaurant un homme qui malgré sa corpulence avait poussé à la perfection l'art de virevolter dans son établissement avait revêtu une tenue de circonstance : veste de smoking en velours et noeud papillon. Sa moustache pommadée frémissait d'enthousiasme tandis qu'il récitait le menu comme on entonne un rhapsodie : c'était une aria gastronomique qu'il attaquait à chaque table en se baisant le bout des doigts avec un tel entrain qu'il devait en avoir les lèvres gercées.Pendant le déjeuner ma femme et moi songions à de précédents jours de l'an passés sous les nuages impénétrables du ciel anglais. On avait du mal à associer au 1er janvier l'éclatant soleil et le ciel d'un bleu indigo.Tout le monde pourtant nous le répétait : c'était absolument normal. Après tout nous étions en Provence…